10 mai 2021 • ACTUALITÉS

Coronavirus : la revanche de la planète sur l’humanité ?

La pandémie du Covid-19 brutale et meurtrière qualifiée de « crise existentielle » par Elise Buckle (1), conseillère à l’ONU doit être l’occasion de repenser les rapports entre l’humanité et la nature.  L’arrivée des épidémies telle que le coronavirus est due aux actions humaines. Ce phénomène que nous sommes en train de vivre va s’accroître ; la forêt, en train de disparaître, est une barrière de protection naturelle pour l’Homme. En voici les raisons.   Nombreux sont les « chasseurs de virus » qui depuis une décennie alertent sur la multiplication et la dangerosité des pandémies en cours et à venir : « Nous avons organisé des systèmes qui font tout pour engendrer puis accélérer ce genre d’épidémies » soulignent Philippe Grandcolas et J.F Guegan, (1) respectivement directeurs de recherche au CNRS et à l’INRA, spécialistes de la biodiversité.  La grande majorité des virus est portée par des animaux sauvages ; dans leur milieu naturel, ces agents pathogènes ont une fonction mais « la perturbation de ces écosystèmes cause en revanche une multiplication d’interactions avec les humains. Elle crée ainsi de nouvelles passerelles pour les microorganismes. » rappelle J.F Guégan. Fidel Baschetto (3), vétérinaire et professeur à l’université de Cordoba explique que ces virus qui sont nouveaux pour nous ne le sont pas pour la nature. C’est la cohabitation entre les hôtes des gants pathogène et l’homme qui produit la maladie. 

Des épidémies propagées par le saccage de l’environnement 

  Le processus est toujours le même : la déforestation et l’artificialisation des sols au profit de la monoculture et de l’élevage intensif, en privant les animaux sauvages de leur nourriture les poussent vers les lieux habités. Inversement les populations locales entrent en contact avec eux par l’exploitation agricole et par la chasse puis la revente sur les marchés de cette « viande sauvage ».  Le chercheur bolivien Carlos Zambrana-Torrelio(3) spécialiste de l’étude des relations entre environnement et pathologies émergentes travaille sur les « zoonoses », ces maladies transmissibles de l’animal à l’homme. Il donne différents exemples de foyers épidémiques dus à la déforestation des forêts tropicales comme celui du virus Chapare ou l’épidémie d’Ebola au Libéria et au Sierra-Léone où la fragmentation de la forêt a entraîné des concentrations de chauves-souris, véritable réservoir du virus. En 2010, une étude publiée dans la revue scientifique Emerging infection diseases montrait que la destruction de 4% la forêt amazonienne avait entraîné une hausse de 50% du paludisme.  Ces zoonoses engendrées par la mutilation des écosystèmes sont aggravées par un système d’alimentation non durable et la priorité donnée à l’économique sur le social et l’écologie, par la mondialisation des échanges et le transport aérien sans parler du réchauffement climatique dont certaines études laissent à penser qu’il pourrait aussi favoriser leur propagation. 

Le confinement donnerait-il un nouveau souffle ? 

  Le confinement a mis en exergue une économie cancéreuse et une diminution spectaculaire de la pollution : amélioration de la qualité de l’air en raison de la diminution des déplacements et de l’arrêt de nombreuses usines et du confinement de 3 milliards d’individus que ce soit en Chine, à Paris ou à Venise. Pourtant selon la directrice du GIEC, Valérie Masson-Delmotte dans une interview à France-Info, c’est un leurre car « la baisse actuelle des émissions carbone est très ponctuelle et anecdotique par rapport au défi du réchauffement climatique qui dépend de la baisse régulière et forte des émissions pendant des décennies. » (5)  De plus, cela ne règle pas le problème de l’émergence et la propagation des zoonoses. Pour ce faire il faudrait que cette crise amène « un moment de résolution » qui selon P. Grandcolas passe par l’abandon « d’une vision manichéenne de la biodiversité ». Ainsi l’éradication des chauves-souris, porteurs d’agents pathogènes, ne ferait qu’engendrer de nouveaux déséquilibres potentiellement dangereux. Il faut en fait « renforcer la compréhension de la biodiversité et son respect » pour J.F Guégan.  Il faut aussi repenser nos modes de vie, de consommation et d’échange non pour tout mettre à l’arrêt mais pour « faire le tri entre essentiel et accessoire » et profiter de cette crise pour faire « une relance verte » comme le demande Elise Buckler(1) avec un arrêt du financement de la déforestation et de l’agriculture productiviste au profit de la reforestation et de l’agriculture durable.  D’une prise de conscience individuelle de la nécessité d’un changement de comportement qui semble émerger, il faut passer à un changement de point de vue de nos gouvernants au niveau national et mondial qui doivent comprendre que l’écologie, la protection des écosystèmes n’est pas une vue idéologique mais la condition de notre survie car « tout changement que nous imposons à la planète aura des répercussions sur notre santé » Carlos Zambrana-Torrelo (3).    Sources :   (1) La Tribune, 27 mars 2020, Covid-19 : les atteintes à la biodiversité ont accéléré l’épidémie   (2) TV5 Monde, 03 mars 2020, Coronavirus le réchauffement climatique et la deforestation favorisent l’émergence de nouveaux virus    (3) Courier International, 28 mars, la destruction des écosystèmes par l’humain favorise l’émergence d’épidémies   (4) Le Figaro,17 mars 2020, l’émergence du coronavirus est-elle liée à la déforestation?  (5) France TV Info , Ce n’est pas une baisse ponctuelle de la pollution qui règlera la question    

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